Mes promenades avec Pistol, bouledogue français ; sa vie, ses amis chats, chiens, vaches et chevaux. Balades insolites dans Paris et ses environs. Nos voyages, nos lectures, nos loisirs.
Après bien des atermoiements de parcours,
après avoir été rejetés au loin par une armée de barricades, déviés, et enfin canalisés dans un passage obligatoire balisé de flèches jaunes, nous avons regagné la rue du Chevaleret où l'ancien, par lambeaux, se tient toujours debout. Nous sommes passés, sans juger bon nous arrêter devant un édifice de béton généreusement agrémenté de plaques aux couleurs clinquantes et de baies vitrées démesurées. Ce clapier à lapins, signée Le Corbusier, qui se veut accueillant et fonctionnel, reste le lieu d'implantation central des Compagnons d'Emmaüs.
Stoïques à l'approche d'une mort programmée, quelques immeubles affichent toujours un label de confort "gaz à tous les étages". Un toit, quelques fenêtres sur le monde, du travail, et la garantie de se retrouver ensemble, au chaud, en échafaudant des projets, en nourrissant l' espoir de pouvoir un jour construire son rêve. A moins qu'un sentimentalisme béat ne vienne brouiller ma perception d'une époque assoupie, que je tente d'imaginer et de reconstruire.
Le rue du Chevaleret débouche sur une petite place ronde. Avant de la quitter, nous prenons le temps de nous épancher sur l'avenir incertain d'un pavillon accompagné de son jardinet qui s'étiole, chaque jour plus seul de son espèce.
Derrière des murs, se trouve le théâtre "Le Lierre" : on se retrouve entre amis, on fait connaissance, la vie continue, comme si de rien n'était, et la jeunesse du quartier ébauche des projets...
En traversant la rotonde, nous avons retrouvé l'extrémité de la rue Watt couverte d'une passerelle désormais impraticable. Subissant l'attraction d'une rue de campagne, nous contournons une habitation en perdition, entourée d'un jardin,
où la nature tirait du sol et du temps, l'espace, et la liberté propices à son épanouissement.
Mais il suffit de se laisser aller à détourner le regard, un instant seulement, pour que la réalité nous rattrape et que surgissent de l'ombre, les monstres profanateurs figés dans leur mouvement, en observance de la trêve dominicale. Dès demain, ils reprendront, imperturbables, leurs activités routinières.
Nous nous laissons guider par les murets de l'humble rue du Loiret, coiffés d' abondantes cascades de lierre, une espèce végétale d'une fidélité sans faille. Elle épouse ses supports et ne pouvant supporter d'en être privée, se laisse mourir.
La silhouette rose et mystérieuse d'un bâtiment que la gigantesque "Dalle" est parvenue à acculer, se précise dans ses détails alors que la petite rue du Loiret nous lâche : en gravissant furtivement quelques marches, on retrouve traces d'un hall, de guichets, d'un escalier mécanique désormais immobilisé. On reconnaît, affreusement grimées les façades d'une gare désaffectée, qui abriterait dans un avenir prochain une centre dédié à l'art du cirque...
Flanquée d'une passerelle brutalement interrompue, qui autrefois, il n'y a pas si longtemps, enjambait des voies ferrées, l'ancienne gare Massénat desservait à l'origine, la ligne de Chemin de Fer Paris-Orléans. Devenue obsolète (jugée désormais trop proche de la gare D'Austerlitz), elle assura un moment les fonctions d'une station du RER, avant d'être définitivement fermée lors de l'ouverture des nouvelles gares RER et Météor "Bibiliothèque François Mitterrand".
Déterminés à ne pas, encore cette fois, nous laisser circonvenir, nous venons de prendre la décision de suivre les murets couverts de lierre de la rue Regnault qui gravite en boucle, avant de nous laisser happer sous l'arche d' un pont ferroviaire.