Au crépuscule de l'été, les terrasses de la place Victor Hugo sont gorgées de tenues légères et riantes : elles transmettent des textures et des couleurs venues d'ailleurs. A la lisière de bois de Boulogne, on se prend déjà, à rêver de campagne
Une humeur enjouée se répand à l'envie sur les trottoirs en croissants de lune. Les soirées s'étirent jusqu'à point d'heure
Après de longues heures de lèche-vitrine, les "belles" viennent reposer leurs jambes fatiguées en s'asseyent à la terrasse de l'un des cafés qui décrivent un cercle autour de la place, à l'ombre du clocher de l'église. Des cadres d'entreprise, très comme il faut, s'entretiennent en groupes restreints d'un sujet qui les préoccupe, avec des airs de conspirateurs.
Sous leur nez, la ligne 2 du métro déverse, dans un élan démocratique,ses flots d'immigrants qui ont été acheminés d'Est en Ouest, d'un bout à l'autre de la capitale, pour gagner les bureaux de leurs ambassades respectives regroupées dans le quartier. Mais la mixité sociale, de courte durée se borne à quelques furtifs coups d'oeil en biais.
Des régiments de cariatides au garde à vous collent étroitement aux courbes qui dessinent les contours de la place
La fontaine émet des flots de paroles qui se confondent aux bribes de conversations interceptées à la volée.
De l'autre côté de la place, l'avenue Victor Hugo qui s'achemine doucement en direction de Boulogne, se fait plus étroite et renonce à l'emphase théâtrale de ses débuts : Stardbuck, Nicolas, Promod...ouvrent indifféremment leur porte au commun des mortels . Je viens de passer un long moment à feuilleter les livres de la libraire Fontaine, sans que personne n'ait trouvé quoi que ce soit à redire..
Un soir de novembre, la grande bourrasque de l'automne a malmené les têtes couronnées. L'hiver prend place. Les parapluies s'ouvrent, le froid s'engouffre dans les moindres recoins. On fixe ses pieds pour s'assurer qu'ils adhèrent toujours au sol
Sur la place, les terrasses se sont repliées sur elles-mêmes et dès la fin novembre,la parade d'arbres de Noël se tient sur ses gardes. La fontaine s'est tue. Ils dansent.
Hors des halos électriques, la solitude est palpable un soir d'hiver.
Au coin d'une avenue, une boutique Cartier qui se garde prudemment d' une exubérance populaire, s'entoure sobrement de deux colonnes éclairées de leds qui marquent l'entrée des initiés.
Protégés par le plastique du coupe-vent, quelques âmes perdues se sont retrouvées.
Il fait froid dehors.
En apparence abandonnée à la convoitise du passant, une douzaine de attend l'arrivée de son destinataire .