aujourd'hui , je renonce à m'extasier, aux termes de quêtes laborieuses, sur quelque pousse squelettiques émergant péniblement d'une nature parisienne toujours pelée. Pluie ou beau temps, ces conversations d'almanach ont le mérite de nourrir un vide certes, mais pas celui de nourrir son homme .
Les jours se suivent, les années passent lentement. Elles se ressemblent toutes, nous enfonçant toujours davantage dans une interchangeabilité opaqu, nous précipitant sans mot dire en direction d'un mur nu. Les décennies s'envolent par poignées. Le mot d'ordre est constant : "le temps presse," "dépêchez-vous". Et sans transition aucune, à tout instant, à tout propos, des voix impérieuses vous commandent de "patienter." Sous quels diktats mentaux et matériels sommes-nous enchaînés ? La vie suit son cours, elle passe, et puis un jour elle nous dépasse.
Nourrie "ad nauseam" de bons sentiments, incrédule devant de multiples promesses jetées en pâture à la va-vite, emportées au loin comme les feuilles d'automne, (parcequ' aucune attention n'a préalablement été prêtée aux inconnues de l'équation), je parts activement à la recherche d' une grande explosion de couleurs et de douceur.
Je fais fi du printemps, et m'arroge le droit grâce aux pouvoirs de l'imagination, de retenir le temps, quelques minutes, à ma guise.
Je m'autorise ce flash back ! il y a quelques mois, on aurait dit le soleil.
Nature et culture cohabitaient sans heurt, lovées dans un enchevêtrement de dentelles.
Aujourd'hui, la vie semble vouloir s'évader des limites imposées
Destination New-York ou Paris, que sais-je.
Nous voici rendus au Printemps. Peut-on encore cette fois, espérer y échapper ?
Je passe et poursuis inexorablement une route, à la recherche d'un événement imprévisible, 'inédit, qui pourrait me renvoyer à un cheminement de pensée plus personnel : rencontre, étonnement, curiosité, questionnement, révélation, ouverture
Est-ce l'effet de quelque pouvoir occulte ou d'une volonté enfouie? Quelque chose s'impose à ma perception immédiate, telle une pépite en plein boulevard Haussmann
Des enfants jouent. Il s'agit bien d'un square ; il porte le nom du dernier des Capétiens,
Quatre rues circonviennent ce petit îlot de verdure :
rue Pasquier, rue d'Anjou, rue des Mathurins, et boulevard Haussmann.
Elles se caractérisent par une suite ininterrompue d'
immeubles d'habitations cossus, de sièges des grandes banques dont les guichets se trouvent au premier étage (les compagnies d'assurance se situant rue Lafayette, dans le prolongement) ...
Le baron Haussmann devenu préfet sous le deuxième Empire, révolutionna Paris en perçant les grands boulevards existants alors, pour construire ce grand axe urbain tout droit, de deux kilomètres et demi prenant sa source à l'Opera et débouchant au pied de l'Etoile (avenue de Friedland, pour être plus précis).
Il répondit en cela à un souci de réorganisation exprimé dès la Révolution et confirmé sous Napoléon III dans la deuxième moitié du XVIIIè siècle.
Pour satisfaire des nécessités de salubrité et de circulation qu'entraînait une concentration urbaine croissante, on expropria massivement, Les habitations construites sur les ponts furent rasées. L'heure était à la création de grands espaces. 'Rien ne semble avoir été prévu déjà à l'époque pour les classes les plus pauvres que l'on commença à dé localiser à la périphérie de Paris.
Ainsi furent posées les bases du "Paris moderne" révélée au monde entier, que nous connaissons.
Immeubles imposants en pierre de taille, parfaitement alignés, façades fleuries s'offrant au regard. corniches abritant des créatures allégoriques, balcons ventrus sculptés en fer forgé, pour les "étages nobles", (au deuxième et au cinquième)
et ici, planté au milieu de nul part, dans ce petit jardin, le fronton d'un édifice m'indique qu'il s'agit bien d'une construction circonstanciée
L'endroit est habité de figures illustres (dont Charlotte Corday et la Comtesse du Barry). Il s'agit de l'emplacement de l'ancien cimetière de la Madeleine où étaient ensevelis les suppliciés de la guillotine (dont le roi et la reine en personne).
A l'occasion des remaniements de terrains, peu après la Révolution, cet endroit fut racheté par un propriétaire qui s'attacha à retrouver le lieu d'ensevelissement exact du roi et de la reine, qu'il entoura d’une haie de charmille, de deux saules pleureurs et de cyprès.
Une vingtaine d'années plus tard, Louis XVIII, tenant à honorer la mémoire de ses aïeuls, se porta acquéreur du terrain. Il décida de faire transporter leurs restes dans la nécropole royale de Saint-Denis et fit ériger par Fontaine, architecte de Napoléon la "chapelle expiatoire" sous laquelle les autres corps suppliciés retrouvés dans le jardin furent rassemblés.
La chapelle, joyau de l'architecture néo-gothique (sur la gauche, et non visible sur la photo), vaut le détour, m'a-t-on dit. Elle fait actuellement l'objet de travaux ; il ne m'a malheureusement pas été possible d'y pénétrer.
Une rencontre échappe souvent à toute logique. L'horloge n'a qu'à bien se tenir.