Ce soir est un peu différent de tous les autres soirs. J'en ai l'intime conviction...
Il n'est pas question de télé. Je le sens-je le sais : je suis prêt !
Ce que je pressentais s'est confirmé au funiculaire de Montmatre à peine repérable dans un halo de fumée.
Il y avait foule, les cabines pleines comme des oeufs, filaient l'une après l'autre sous notre nez.
A bout de patience, nous nous sommes résolus à prendre les grands moyens et à entreprendre courageusement la montée des quelques deux-cents marches de l'escalier qui suit parallèlement le tracé rectiligne du funiculaire.
Avantage sur les transports modernes trop rapides, nous avons pu admirer à loisir le panorama du square Willette sous un angle particulier
Avec précaution, à notre rythme, laissant les cabines aux touristes, nous nous sommes approchés, à pas de loup, de la Basilique, .
Nous mesurons avec fierté notre accomplissement. Une montée que les anciens du village faisaient quotidiennement avant que le funiculaire ne soit apparu, pour desservir le Sacré Coeur.
A deux pas du café panoramique, nous risquons quelques coups d'oeil à-travers les barreaux d'une grille, sur d'étranges préparatifs qui se trament en contrebas. Des voyageurs affairés déballent leurs valises. Nous nous éternisons, en vain. Les vas et viens des protagonistes ne nous sont pas directement destinés. Rien à manger : Je râle un peu...
La Place du Tertre est anormalement animée pour un lundi après midi, et "le Consulat" a ouvert tout grand ses portes. Mais il n'est pas encore l'heure de manger français.
La fleur au balcon, la terrasse de la "Bonne Franquette" a un petit air de fête... en quel honneur ? Les fleurs se laissent admirer, mais non manger...
Une épaisse fumée provient de la place des Abbesses. Et pourtant les promeneurs ne semblent pas vouloir fuir de danger. Se peut-il qu'il existe de la fumée sans feu ? Et de feu sans victuailles ?
Moi, j'en ai l'intime conviction...
Une boite rectangulaire noire est postée sur l'enseigne d'un bar très branché. Elle contient quelque chose de festif...Un tintamarre s'en échappe.
A la "Boom-Box", répond en écho un instrumentiste attablé sur la marquise
d'un bar voisin très fréquenté.
On y boit surtout, on y mange parfois...
La saint-Vincent est dignement fêtée à Montmartre tous les ans, le 22 janvier. Mais aujourd'hui, c'est "la Fête de la Musique", et une fête, telle qu'elle soit, cela s'arrose.
Les sonos seront bientôt au point et l'impressionnante machinerie va éclater. J'aime la musique, les pétarades ne me font pas peur. Mais le plaisir pour être complet doit aussi être gustatif. La truffe au sol, je fouine avec fébrilité à la recherche de quelque morceau de sandwich pas terminé.
Les saints-de glace sont repartis comme ils étaient venus, Saint Médard et Saint Bernabé se sont concertés ; voilà, c'est fait. Voici enfin la saint-Jean : il était temps, mais qu'il fait frais !
Nous regagnons Ménilmontant pour retrouver de la fumée...ici aussi !
Pas de fumée sans feu...et pas de feu sans repas.
Je me laisse guider vers "le point chaud", là où il se passe quelque chose. Des effluves de merguez grillées parviennent par vagues de plus en plus rapprochées à mes narines délicates. Mes babines accusent quelques involontaires frémissements de convoitise.
Entourés de monstrueuses installations, des DJ mettent toute leur science et leur concentration à concocter de planantes sonorités.
Mon estomac émet des gargouillis
et les vendeurs de merguez font feu de tous bois pour satisfaire les féroces appétits.
A tous les coins de rue, devant chaque réverbère, on joue de la musique ... toutes sortes de musiques : manouche, jazz, rock, rapp, classique, house, blues...
A Paris, et partout en France, c'est la fête de la Musique.
Et une fête, cela s'arrose ...
Alors là, voilà le Chef !
Le bon passe, comme le mauvais...disait ma grand-mère.
Délicieux ? Cela devait l'être à coup sûr :
Il est passé tellement vite que je n'en ai même pas senti le goût.