La voie pavée, cahotante, hors du temps, ne semble pas devoir suivre un itinéraire précis ; elle se contente de butiner langoureusement l'instant présent, tout en gardant ça et là trace d'un passé rustique et laborieux. Cinq Diamants ! le nom renvoie l'image mentale d'un précieux minerai pur et rayonnant, extirpé des tréfonds de la terre par la violence de volcans en colère.
La beauté ne s'embarrasse pas d'emphase : douce intimité d'une porte toute simple, isolée du monde par un rideau de dentelle feuillu où s'introduisent par intermittence, tels des lutins, des éclats de soleil qui prennent à peine le temps d' esquisser quelques pas de danse, avant de disparaître.
Retenues dans leurs foyers. Les chiennes sont sous pression.
Pistol mélancolique et inoccupé se morfond derrière les vitres, en scrutant le ciel, dans l'espoir de voir apparaître un signe annonciateur de "reprise".
La faveur d'une éclaircie céleste lui a été accordée : il nous tardait de partir à la recherche de cinq diamants...
A l'aune de la voie sacrée qui mène de nos jours aux temples des réjouissances, un hôtel se niche dans une touffe de feuilles entre ciel et terre ...
Boire, manger, dormir, chanter !
A peine engagés dans la rue, , nous longeons une façade grise un peu anachronique, que la sobriété serait parvenue à rendre invisible, si le paysage alentour ne venait se réfléchir sur sa verrière transparente ...comme un diamant
En 2008, le nouveau Théâtre des Cinq Diamants naissait sur les fondations d'un atelier bouillonnant d'activités dès les années 1930 : c'était là où s'essayaient les girls des Folies Bergères en répétition et, dans un autre domaine d'activités, le boxer Marcel Cerdan en personne..
(photo empruntée au fonds documentaire de Georges Bernard Faget, un Montmartois de coeur, apprécié dans les domaines de la peinture et du théâtre. http://www.faget-benard.com/bio/brieux.html)
En 1975, l'atelier devient officiellement un théâtre : La Compagnie Catherine Brieux s'y produit au cours des années 1990
Arrivent les années 2000 : la structure en pans de bois de l'ancien atelier, jugée dangereuse doit être démolie...
Un village n'en serait pas un, sans son Café du Commerce : accueil chaleureux, bons plats traditionnels de "chez nous" et d'ailleurs... Chacun se sent chez soi et les prix sont tout doux.
Sur chaque trottoir, s'échappant des cafés, "la musique adoucit les murs" (Jeff Aérosol, Lézarts de la Bièvre)...
mais suscite l'humeur mutine de certains riverains chagrins.
Le soir de la Fête de la Musique, bars, cafés, et restaurants ont obstinément fermé leurs portes et leurs rideaux. De même "chez Gladines", l'un des restaurant les plus en vue de la Butte, qui ce soir là affichait ostensiblement sa colère contre un arrêté préfectoral qui viserait à interdire le service des alcools en terrasse à partir de 17 heures ! Prendre l'apéritif en terrasse en attendant qu'une table se libère est une tradition au village..
Il est vivement suggéré aux riverains trouble-fête qui ont investi les charmantes demeures alentour, dans l'espoir d'y réaliser de juteux placements, de ne pas s'acharner à tuer un quartier où il faisait bon vivre, et d'aller élire domicile dans un coin où dorment paisiblement les pères tranquilles.
Nous avons dépassé le pas de porte d'une société d'édition, et n'osons perturber la marche d'une concertation qui se tient dans la boutique d'un libraire, où les fidèles de l'association des " Amis de la Commune" se sont réunis.
A l'angle de la rue du prophète Jonas, un hôtel de caractère, point de rencontres de talents artistiques ...
Nous nous trouvons déjà à une altitude de 109 mètres au-dessus du niveau du Boulevard Auguste Bianqui.
Si la Butte, un ancien quartier de chiffonniers et d'artisans a pu conserver sa physionomie campagnarde, elle doit doit la grâce qui lui a été accordée à sa configuration : elle repose sur des carrières de gypse qui n'auraient jamais supporté le poids des grands ensembles contemporains.
Sur le côté opposé de la rue Jonas qui fait angle, une empreinte fantasmagorique, celle d'un "pochoiriste" qui au fil des années 2000 a gagné une notoriété internationale.
Les Cinq Diamants persistent à se dérober à notre vue, à notre entendement : ils sont entrés dans la légende...
Mais il est permis d'imaginer que se tenait dans la rue une échoppe, où un diamantaire exerçait ses talents avec amour.
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