Les Champs Elysées, méritent-ils toujours le nom de "plus belle avenue du monde" ?
Voie triomphale" au XVII siècle, lieu de divertissement au XIX, lieu commercial depuis 1900, les "Champs" suivent les flux et les reflux des marées : de la "Belle Epoque" aux affres des deux conflits mondiaux,
des "Trente Glorieuses" aux grandes désillusions.
C'est ici, que depuis plus d'un siècle, sont censés être présentées dans leur quintescence, les différentes vitrines commerciales, industrielles, automobiles (Ciroên et Renault se font face) cinématographiques et aéronautiques.
Nous venons d'émerger de la bouche du métro Etoile, qui s'ouvre en baillant, à quelques mètres d'une énorme place ronde au coeur de laquelle dort un soldat inconnu, et où convergent douze avenues dessinées au XIX siècle, par un baron Haussmann. Le centre de l'Etoile est marqué par l'emplacement d'un Arc de Triomphe où le vétéran repose sous bonne garde, et autour duquel bourdonne un vertigineux manège d'automobiles.
La place, en forme d'étoile qui s'est longtemps appelée, à juste titre, "place de l'Etoile" a été rebaptisée " Charles de Gaulle - Etoile" ; les plaques ont subi ce rajout, mais à Paris, dans la vie de tous les jours,
on se contente de faire court .
Les frimas se sont affirmés sur la pluie pour les fêtes, et des cristaux de led ont veiné les deux rangées d'arbres (qui depuis Marie de Médecis se sont succédés, aux mêmes empacements, le long du "Cours de la Reine"), montent la garde de part et d'autre de la vaste chaussée. L'avenue des Champs Elysées s'étire de la place de l'Etoile à l'Obélisque de la Concorde : un parcours de près de deux kilomètres, sur une largeur de soixante quinze mètres.
Trente mille piétons par jour (trois cent mille en moyenne le week end), quatre-vingt milles passages de véhicules quotidiens, et des commodités (feux tricolores, colonnes Meurisse, kiosques à journaux) en nombre proportionnel à la demande...
A la faveur des années soixante-dix le luxe, même s'il s'affirme encore haut et fort, accueille dans son voisinage des enseignes franchisées beaucoup moins prestigieuses,
L'avenue se vide de ses palaces: Le Claridge ferme ses portes en 1976. il est transformé en galerie commerciale Sa vaisselle, ses éléments décoratifs et sanitaires, son mobilier, autant de souvenirs d'une ère révolue, (au même titre que le Paquebot "France", envoyé à la retraite au cours de cette décennie), s'arrachent au cours d'une vaste vente aux enchères.
Nous ne pouvons qu'admirer les reliefs d'une époque, et imaginer ce qui se passe derrière les portes voisines...
entrée exclusive, "luxe austère";
Quelques rêves accessibles se trouvent au "palais" de Louis Pion qui distribue, pour le compte des Galeries Lafayette, des gammes de montres, véritables accessoires de mode, dont les prix s'échelonnent de 20 à 200 Euros
Citroën a toujours su mettre en valeur les facettes spatio temporelles des épisodes qui ont jalonné le vingtième siècle, et semble possèder l'art et la manière
d'en tirer parti.
Espaces protégés d'un restaurant où se dégustent des mets thai
Si ce n'est le froid, l'élégance, le port altier du portail d'un immeuble en aval de la "plus belle avenue du monde" me fige sur place : que de grandeur, que d'élégance se dessinent à la faveur des volutes ferronnières...
Je viens d'être informée que l'Immobilière Dassault a signé un bail avec une grande enseigne de luxe, l'immeuble étant vacant depuis le départ de la ccompagnie Thai Airways, en 2007.
Au n° 99, Le célèbrissime Fouquet (lancée en 1898) est classé monument historique dans les années 1980, afin de protéger sa façade des effets pervers de l'invasion des Mac Do et autres Pizza Pino. Il reste sur son quant à soi... à telle enseigne, que les femmes non accompagnées n'y seraient toujours pas admises.
Au n° 116, un passage couvert d'une largeur de quinze mètres, (exceptionnelle pour l'époque et éclairée exclusivement à "la lumière artificielle"). Les centres commerciaux comme celui-ci faisaient alors fureur... D'abord baptisé "Arcades des Champs Elysées", cet espace est ouvert dans les années 1920 pour conjuguer les plaisirs de la promenade et les activités commerciales .
Caverne d'Ali Baba aux parois de marbre blond et noir... S'ouvre la perspective d'un parcours de "découvertes", ponctué d'appliques Lalique de bronze
Géante verrière céleste, soutenue par de solides colonnes
Jeux de miroirs multipliant l'espace et la lumière
En 1929, le Lido vient s'installer dans les locaux. Il offre les agréments d'une piscine et de salles de beautés. Puis il devient le célèbre cabaret que nous connaissons toujours
En 1997 le cabaret fait ses malles, pour s'installer quelques mètres plus bas.
Les Arcades des Champs Elysées dont les attraits sont évincés par l'écrasante présence du Lido voient progressivement l'aura de leur enseigne originale ("les Arcades des Champs Elysées" ternir. Elles font désormais partie intégrantes des "Arcades du Lido" avant de se résumer en un modeste "Passage du Lido". Depuis lors, et au fil des années Les Arcades se contentent d'hôtes beaucoup moins prestigieux.
En 1998, signe des temps, s'ouvre au 70 avenue des Champs Elysées une succursale de la chaîne d'hôtel Marriott, cinq étoiles luxe offrant à l'homme d'affaires moderne toutes les facilités requises. Je me réjouis de constater que l'esthétique des abords n'a pas été trop sacrifié au profit du fonctionnel"
Les arbres semblent autant de verres de cristal alignés sur la nappe d'une table de convives prêts à trinquer sous une étoile que chacun souhaite bienveillante.
A l'extrêmité de l'avenue, là où elle prit naissance, la grande roue du Temps, reste campée, en dépis de toutes les controverses que sa présence suscite, sur la place de la Concorde.